E.1.3.Obtenir  des céréales , d'autres  farineux  et  du chanvre.

 


Nous voyons les nombreux champs de céréales autour des « villages du bas », représentés par des rectangles clairs ( Cf. supra page 14 ), image d'une situation dans les premières décades du XXè Siècle.

Pour l'ensemble de la commune, cette importance est estimée à cent soixante sept hectares sur le relevé statistique de 1868 (10) ( voir ci-dessous).

Les moissonneurs vont travailler sur les parcelles, une fois la fenaison terminée.

La moisson.

Les céréales, aux Avanchers, peuvent être appelées indistinctement « lou bla » ( le blé ), mais dans l'ordre décroissant récolté, il y a d'abord le seigle

( sâla ) puis l'avoine ( avèna ) et l'orge ( ôrdz ) enfin un peu de froment ( fromin ).

Le faucheur travaille avec les céréales plus délicatement qu'avec le foin car il faut perdre le moins de grains possible. Ensuite, on assemble en gerbes, on les dresse en les appuyant les uns contre les autres, par groupes. Pour le transport à la grange, on donne la priorité au transport à dos d'homme.

Le battage.

Pour obtenir le grain ( lou gran ), les gerbes, stockées à proximité, seront battues au fléau ( fleyo ) sur un plancher spécial de la grange ( le chwè ). Ce battage, à un ou plusieurs, s'entreprend en automne ou loin dans l'hier, au fur et à mesure de la consommation.

Séparation du grain de sa balle.

Pour cette opération, on emploie le tarare qui agit par ventilation. L'appareil ci-dessous est presque totalement en bois, engrenages, ventilateur intérieur, trémie, sans parler de l'ensemble de la caisse.

Le chanvre ( tsnèv )

En 1868, six hectares sont cultivés en chanvre dans la commune, d'après l'estimation statistique citée précédemment.. Nous avons rencontré plusieurs traces de cette plante textile. La première, au dessus des villages des Fey. Dans un endroit  humide, se trouve une petite mare ( on né ) destinée, d'après les anciens, à faire rouir les tiges de chanvre c'est à dire isoler les fibres de la matière qui les soude. Les autres traces sont conservées dans le Musée des Traditions à Quarante Planes. Il s'agit de deux exemples d'usage de ces fibres : le premier c'est un appareil à fabriquer des cordes, le second, une longue tunique écrue d'un membre de la Congrégation du Saint-Sacrement, tunique taillée dans de la toile de chanvre.

 

 

 

Statistique pour l'année 1868, pour les récoltes de céréales et autres farineux.

(La méthode pour obtenir ces valeurs statistiques, figurant au bas de cette page sont, pour être lisibles ,

reprises au § H.4.3 /.page 73 )

 

 

 

Tarare

 

Tarare; en dépôt dans une "grange Compagnon" au Fey.

 

(10) ADS / ACA / 190 E dépôt 66.

 

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E.2.LES  AVANCHERAINS,  ÉLEVEURS  ET PRODUCTEUR  LAITIERS.

 

Les tâches d'éleveur et de producteur laitier sont imbriquées, il est donc difficile de les séparer. Nous essayons cet exercice théorique dans le présent chapitre, tout en remarquant que ces tâches n'ont pas pour but premier la production de viande mais celle de lait et de ses dérivés.


 

E.2.1. Élever principalement des bovins.

Commençons par des résultats chiffrés concernant cette activité. Le tableau de la page 41 ci-dessous, indique par le détail, les nombres "d'animaux de ferme" existant aux Avanchers en 1890.

Ce sont les bovins les plus nombreux ; ils représentent  nettement plus de soixante pour cent de l'ensemble. L'activité principale de nos montagnards leur est destinée. On vient de voir les travaux de la fenaison pour leur fournir du foin à l'étable ; s'y ajoute tout ce qu'il faut faire pour les soigner. A la base, il faut constater que chaque groupe familial  cherche à équilibrer la composition de son troupeau avec ses ressources fourragères.

Au fil des années il faut :

▪ apprendre à travailler, en fonction des périodes et dates du calendrier des saisons, ▪ tenir compte de la période de gestation de la vache, ▪ du moment où elle va vêler donc, ▪ du moment où elle sera  conduite au taureau, ▪ de la période de nourriture de son veau, ▪ du moment où elle montera à l'alpage et y produira du lait.

Le suivi des taureaux.

De ces géniteurs, le tableau de 1890 en recense quatorze. Pour l'été sur les montagnes communales de Beaudin et de Malatray, le règlement du 20 Mai 1906 article 6, précise : « les procureurs (11) loueront les taureaux nécessaires ou en achèteront au nom de la Société, s'il ne trouvent pas à en louer » (12). Pour l'hiver, nous avons découvert une adjudication publique lancée pour l'hivernage de deux " taureaux communaux" : « la mise à prix est de 140 fr., pour chacun. La taxe pour chaque saillie est de 0, 60 fr., elle restera acquise au soigneur pour ses peines et dépens. Il est interdit de faire servir les taureaux à des vaches étrangères. L'adjudicataire sera tenu de soigner le taureau à lui confié, en bon père de famille » (13).

Les ventes 

Quelques fois, un maquignon de passage achète une vache mais plus souvent c'est à Moutiers que, depuis des siècles, les ventes se traitent ( Voir ci-joint, page 41, le Pré de foire bien rempli ).

Il faut une longue marche pour y venir. Nous avons signalé le rôle de relais d'étape, joué par le petit bâtiment des Cours ( Cf. § B.4.1. p.15).


 

E.2.2. Produire du lait et ses dérivés.

Les saisons commandent les travaux à conduire pour obtenir une bonne production d'une vache, laitière, généralement de race tarine. Cette bête bien adaptée aux terrains pentus, au climat rigoureux, est robuste. L'évolution au XXe Siècle, vers une production fromagère de qualité, conduisant au Beaufort, lui donne une certaine notoriété (14).

E.2.2.1.L'hiver à l'étable.

Les basses températures et la neige, imposent aux  animaux de ferme, la vie dans l'étable. En gros, les femmes ont la charge de les nourrir et de les soigner, les hommes assurent l'évacuation du fumier et du purain. Le lait produit est soit converti individuellement en tome, cérac, beurre, soit transporté dans une fruitière de village, petite fromagerie, où un professionnel fabriquera du gruyère avec le lait collecté dans le périmètre de cette fruitière coopérative. Dans les années 1900, trois fromageries sont installées, respectivement au Chef-lieu, au Meiller et à la Grange. Nous avons trouvé des indices de leur existence pour deux d'entre elles. Le premier, avec la création de celle du Chef-lieu. Nous sommes le 18 juin 1893, avec une délibération municipale rapportée comme suit (15):

 « Vu une demande en date du 4 juin 1893 présentée par les administrateurs de la fromagerie en voie de création au chef-lieu de cette commune tendant à obtenir de la commune, la vente ou la cession gratuite, pour la construction du local destiné à la dite fromagerie, d'un petit bâtiment situé sur la place de la mairie d'une contenance de 6 centiares. Considérant que le dit bâtiment dont il s'agit est en ruine et n'est plus d'aucune utilité pour la commune.  Est à l'unanimité d'avis de céder moyennant la somme de 20 francs à la Société de la fromagerie le sus dit bâtiment aux conditions suivantes :

1) les ardoises et les bois qui proviendront de la démolition resteront acquis à la commune, 2) les pierre qui proviendront de la démolition des murs seront employées à endiguer le ruisseau. Ce travail sera fait par la Société de fromagerie, 3) La dite Société prendra à sa charge les réparations que nécessite la toiture des latrines de l'école des garçons du chef-lieu. Les demandant pour créer cette fromagerie sont Jean Marie Jay, Émile Bouvier et Pierre André Rellier ( administrateurs).»

Le second indice est, en août 2000, la vente par la Coopérative, à la commune pour le franc symbolique, du bâtiment de la fromagerie de La Grange. Sa démolition suivra, nous l'avons constatée sur place. La fromagerie du Meiller, devenue musée, garde la mémoire des trois fruitières de village (16).

 

 

(11) Ce sont des responsables , élus pour la saison d'estive, par les propriétaires des bovins, groupés en société, pour chaque montagne

(12) ADS / ACA / 190 E dépôt 53.

(13) ADS / ACA / 190 E dépôt 108.

(14) ASPORD, (R.), 2003, page 52

(15) ADS / ACA / 190 E dépôt 64.

(16) La collecte quotidienne, du lait en bidons, destiné à la Cave  de Moutiers, a rendu sans objet, les fromageries de village.

 

 

 

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